Travailler puis vieillir seuls
Eux qui étaient venus « pour travailler un point c'est tout » sont toujours là, sans l'avoir vraiment choisi. Les résidents du foyer sont maintenant en majorité des « chibanis » comme on les surnomme en arabe. Vieux travailleurs immigrés, anciens travailleurs des chantiers navals mais aussi travailleurs du bâtiment, ils ont contribué à construire la cité Berthe où se situe le foyer API , en retrait, un peu à leur image. Ces travailleurs peu qualifiés ont connu une extrême mobilité professionnelle et géographique. Leur installation au foyer s'est faite à des dates différentes : les Sénégalais sont les premiers résidents puis les Maghrébins s'installent au foyer API après la fermeture des chantiers, quand ils se trouvent confrontés au chômage, à la précarité ou à un divorce. Par ailleurs, la loi leur impose de séjourner en France pour percevoir certaines de leurs allocations. La famille est restée au pays, dans la perspective d'une migration temporaire qui s'est prolongée. Le regroupement familial n'a pas été envisagé, par manque de moyens d'accueil, mais aussi parfois par le refus soit de l'épouse, soit du mari, de quitter le pays et son mode de vie traditionnel.
Beaucoup alors avaient l'illusion d'un retour possible. Leur vie est rythmée par des retours saisonniers au pays, auxquels certains doivent renoncer faute de moyens ou pour des raisons de santé.
« Le foyer AVOM, puis API a été créé par l'Office public HLM de La Seyne-sur-Mer au début des années 80, pour répondre aux besoins d'hébergement des travailleurs sénégalais salariés des chantiers navals de La Seyne. Le foyer est actuellement en cours de réhabilitation dans le cadre du plan national pour la rénovation urbaine (ANRU). Il n'a pas été conçu pour être un lieu de vie permanent. »